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 Un matin comme un autre

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3 participants
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les pizzas joey
Arpagon



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Emploi : Etudiante en cinéma
Date d'inscription : 02/05/2006

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MessageSujet: Un matin comme un autre   Un matin comme un autre EmptyMar 2 Mai - 19:52

Voilà une nouvelle qui reste encore à fignoler, mais comme en ce moment je n'ai pas le temps de m'en occuper, je la poste telle qu'elle est maintenant.
Bonne lecture Un matin comme un autre Wink32


Un matin comme un autre


C’était un matin comme un autre, un matin où la lumière filtrait à travers les rideaux et où j’étais réveillée par son parfum. C’était comme ça que je démarrais la journée. A peine j’ouvrais les yeux que je la voyais s’étirer comme un chat, signe qu’elle était réveillée. Bien sûr, on ne dormait pas tous les jours ensemble, on avait chacune notre vie. On voulait juste faire un essai, pour voir comment ça fonctionnait. Et puis finalement l’essai s’est prolongé. Ca fait un an qu’on s’essaye, et on s’essaye plutôt bien je trouve.
C’était un matin comme un autre, un matin où seule sa bouche arrivait à me tirer de mon sommeil. Sa bouche qu’elle s’appliquait à balader sur tout mon corps. On avait commencé notre relation comme dans les films. Au troisième rendez-vous on s’était embrassées. On laissait nos mains caresser nos corps au rythme incessant des baisers. Baisers que l’on aimait prolonger jusqu’à ne plus pouvoir respirer.
C’était un matin comme un autre, un matin où je n’arrivais à me lever que lorsque sa main m’attirait contre son corps. On avait bien sur finit par faire l’amour. Avec hésitation, pudeur et maladresse la première fois. Puis douceur, puis violence. Toujours avec plus d’envie et de désir.

La première fois que je l’ai vu, ou plutôt aperçu, c’était rue de Gand, dans le vieux Lille. Je voulais réserver chez La Vieille, et elle était là, devant l’enseigne, à chercher les horaires d’ouverture et à enregistrer dans son portable le numéro de téléphone de l’estaminet. Comme je voulais faire la même chose, je me suis mise à côté d’elle et j’ai pris mon petit carnet jaune pour noter tout ce dont j’avais besoin. C’est là qu’elle m’a sourit. Mais à Lille, quand les gens sourient, c’est pas comme dans le reste de la France. C’est pas un sourire gris ou un sourire en coin, c’est un sourire franc, un sourire plein de soleil. Alors je lui ai sourit aussi, mais comme je ne viens pas de Lille, je crois que le côté gauche de ma bouche est resté crispé pendant une demi seconde. Je ne sais pas si elle l’a remarqué. Elle m’a dit au revoir et elle est partie. J’ai pas souvenir qu’elle m’ait dit bonjour.
Je l’ai revu deux jours plus tard, je venais annuler ma réservation chez La Vieille. Il était 21h00 je crois, ou peut-être un peu plus je ne sais plus vraiment. Comme mon téléphone était en panne, et comme je n’aime pas prendre le métro le soir, j’avais dû faire une heure de marche pour venir chez La Vieille. Et elle était là, encore. Je ne sais pas si elle m’a reconnu. Enfin elle m’a bien sourit, mais je ne sais pas si c’était par politesse ou si elle savait que c’était moi, l’inconnue au petit carnet jaune. En deux jours, je l’avais mise de côté cette femme, ou plutôt je l’avais oublié. Mais là, elle me revenait tout d’un coup, avec son sourire un peu comme un soleil. Elle, elle était assise à une table, elle attendait quelqu’un. Pendant quelques secondes, je me suis surprise à croire que celle qu’elle attendait c’était moi ; puis je suis descendue sur terre quand on m’a dit que ma réservation avait bien été annulée. Je l’ai regardée une dernière fois, et puis je suis sortie. J’ai fait une heure de marche et je suis rentrée chez moi. J’ai retrouvé mon lit vide et ma chambre vide. J’ai téléphoné à une amie de longue date, je lui ai raconté quelques histoires anodines -en omettant bien sur les dernières heures que j’avais vécu- et puis j’ai allumé la télévision. Il n’y avait jamais rien comme d’habitude, mais au moins j’avais l’impression d’être moins seule. Pendant que ma facture d’électricité atteignait un niveau qui frisait le déraisonnable, moi j’étais étendue sur mon lit vide, et je pensais à cette femme. Je ne sais pas ce qu’elle m’avait fait. A part son sourire et son allure un peu mystérieuse elle n’avait rien de spécial. Mais pourtant elle avait attiré mon attention. Et ce qui m’agaçait le plus était que je ne savais pas pourquoi. Je suis restée étendue plus de deux heures sur mon lit vide, deux heures, et puis après j’ai finit par m’endormir. Le lendemain matin, je croyais ne plus l’avoir dans la tête, mais vers midi, à l’heure de manger, j’y ai repensé. C’était pas comme si j’y repensais comme ça, par hasard ; elle m’obsédait réellement. Et je m’inquiétais. Etait-ce un amour naissant ? Un coup de foudre ? Devrais-je aller voir le docteur ? Un psy ? Devrais-je appeler ma mère pour lui demander conseil ?
Finalement j’ai opté pour une cigarette.
Un homme –que je ne connaissais pas- dans le métro avait une fois engagé une conversation sur le shit, en me disant bien que fumer ne nuisait pas à la santé mais que, au contraire, cela permettait en quelque sorte une introspection. Fumer c’était penser plus loin, plus profondément. A quoi servent nos philosophes m’étais-je demandée sur le moment. Est-ce que tous les soirs ils s’enfilent quelques doses dans le bras, est-ce qu’ils sont tous sous substance illicite ? Et s’ils ne le sont pas, que se passerait-il s’ils l’étaient ? Non, une cigarette c’est mieux. Et puis, comme je n’avais jamais fumé de ma vie, je pensais que peut-être une cigarette aurait le même effet sur moi qu’un pétard sur cet homme. Alors voilà, j’ai opté pour une cigarette. Cigarette que j’ai eu vite fait de jeter à la poubelle, en toussant comme un pot d’échappement, et en vomissant de la fumée grisâtre et nauséabonde.
A la fin de l’après-midi, j’avais enfin oublié cette femme –merci la cigarette.

Une semaine plus tard, je prenais le train pour Orléans. A la gare de Lille, il y a toujours plein de pigeons, comme dans toutes les gares d’ailleurs. Je n’avais jamais remarqué, mais il n’y en a pas un seul qui a une patte entière ; on dirait que se faire happer par un RER est le passage obligé pour rentrer dans la confrérie des pigeons.
Je m’assoies à ma place, et je regarde par la fenêtre. J’aime bien voir les gens s’activer dehors. Il y a toujours un homme qui traîne trois valises et qui râle parce que vraiment sa femme elle pourrait au moins en porter une ! Il y a toujours une femme qui cours après sa petite fille, parce que sa petite fille elle est pressée de monter dans le train, ou parce que sa petite fille elle veut un dernier bisou-ventouse de son papa avant que le train s’en aille. Il y a toujours une greluche qui fait attendre deux autres greluches parce qu’elle vient de se casser un ongle en portant son sac de voyage Adidas tout rose avec des bandes noires et blanches et un porte-clef Diddl.
Et puis voilà, je sent une main sur mon épaule, alors je me retourne. Et la femme était là, la femme de chez La Vieille. Elle allait s’asseoir à la place 47, à côté de la mienne, la 46, elle allait s’asseoir à côté de moi. Alors là, comme moi, vous vous dites que le monde est petit, n’est-ce pas ? Moi aussi ça m’a fait ça. La fenêtre est devenue beaucoup moins intéressante, la mamie qui venait de faire tomber sa valise aussi.
Pendant tout le trajet j’essayais de me concentrer sur autre chose que sur elle, car je savais pertinemment qu’au moindre écart, qu’au moindre coup d’œil jeté dans sa direction, j’allais replonger dans cette spirale qui me tenait en haleine depuis que son image était gravée dans mon esprit. Moi j’étais du côté fenêtre, et il y avait ce petit courrant d’air qui s’enfilait sur mon cou, ce petit courrant d’air qui, à chaque fois, fait inlassablement voler les rideaux du train. J’ai posé mon écharpe sur mon cou pour combler le trou d’air, et j’ai senti quelque chose me frôler. Un pied. Je secouais la tête, c’était sûrement un effet de mon imagination. J’ai reposé ma tête sur l’écharpe qui comblait toujours le trou d’air, et j’ai sentit son pied me frôler à nouveau. C’était bien son pied, il n’y avait pas d’autres pieds que les siens, et puis je n’allais pas m’amuser à me frôler moi-même. Alors j’ai risqué un coup d’œil discret vers elle, elle lisait, et son pied se balançait un peu n’importe comment, de gauche à droite, d’avant en arrière, un peu en cercle, un peu en spirale. J’ai soupiré, et encore une fois ma tête est allée rejoindre mon écharpe. Je commençais à fermer mes yeux, quand encore une fois je sentit son pied me frôler, avec instance. Qu’elle se rassure j’avais compris cette fois. Je me suis redressée -elle souriait, toujours comme un soleil- et je l’ai regardée en face, bien en face pour ne pas avoir le moindre doute. Elle me défiait du regard, c’était impressionnant ; jamais on ne m’avait tenu tête avec autant d’aplomb. Elle, l’inconnue au visage rayonnant, m’envoyait comme une flèche son sourire en plein cœur.

Elle allait voir sa grand-mère à Paris . Sa grand-mère qui était malade et qui voulait la voir une dernière fois. Moi j’allais à Orléans voir mes parents. Mes parents qui étaient mes parents et qui voulaient me voir une fois par mois. On a discuté un petit moment, une heure, le temps d’aller à Paris. Et puis on s’est séparées à la gare. Sur un bout de papier on s’est échangées nos numéros et on s’est dit « au revoir, de toute manière on se reverra à Lille ».
Toutes ces paroles qu’on lâche, un peu comme ce trou d’air qui vient nous coller à la peau… Toutes ces paroles que l’on n’est pas sûr de tenir, mais que l’on dit quand même, parce que c’est joli à entendre, et parce que ça fait plaisir. Toutes ces paroles… mais celles-là, cet au revoir là, c’était sûr qu’on allait se revoir. C’était une promesse.

Au bout d’une semaine la spirale me tenait trop en haleine je n’en pouvais plus, alors je l’ai appelé. Elle était toujours à l’hôpital, avec sa grand-mère qui finalement avait décidé d’attendre un peu avant de mourir. Trois jours plus tard elle était à Lille, on a décidé de se voir et j’ai réservé chez La Vieille.
On avait commencé notre relation comme dans les films. Au troisième rendez-vous on s’était embrassées. On voulait juste faire un essai, pour voir comment ça fonctionnait. Et puis finalement l’essai s’est prolongé. Ca fait un an qu’on s’essaye, et on s’essaye plutôt bien je trouve.

Hier j’ai pris le train pour Paris. Elle ne voulait pas que j’aille la voir, mais j’ai appris à lui tenir tête. Elle est habituée maintenant, trois mois que je viens la voir. En réalité, elle n’était pas là pour sa grand-mère, sa grand-mère était morte depuis longtemps déjà.
C’était un matin comme un autre, avec comme véritable réveil, celui du bruit de cette machine. Ce respirateur, relié à sa trachée, comme unique espoir, comme unique obstacle à sa mort. C’était un matin comme un autre et elle était toujours là. Elle ne sentait plus mes baisers, elle n’entendait pas mes paroles réconfortantes, elle ne me voyait pas pleurer non plus.
C’était un matin comme un autre, un matin passé à dormir sur une chaise devant son lit. Un matin où la lumière filtrait à travers les rideaux et où le parfum de l’éther ne parvenait même plus à me soulever le cœur. Un matin où je pensais que si je ne pourrais plus jamais l’emmener chez La Vieille, ce serait La Vieille qui viendrait à elle. Un matin où je croyais que plus aucun sourire ne pourrai égaler le sien. Un matin où j’aurais aimé avoir fumé à m’en rendre malade, rien que pour être à sa place à cet instant, rien que pour qu’elle puisse sourire à nouveau.


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Sylvain
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MessageSujet: Re: Un matin comme un autre   Un matin comme un autre EmptyDim 7 Mai - 19:08

Comme je te l'ai déjà dit, je trouve le style très fluide et ton écriture très sensible. J'aime beaucoup les petits détails, et les visions de la vie et du monde du personnage, sans que cela tombe pour autant dans style romantique cliché.
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yuna
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MessageSujet: Re: Un matin comme un autre   Un matin comme un autre EmptyDim 28 Mai - 11:59

Trés beau style je trouve, c'est aussi léger que doux, ça ne lasse pas, c'est interessant et puis ( comme le dit Sylvain ) c'est sensible

Enfin j'ai bien aimé
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MessageSujet: Re: Un matin comme un autre   Un matin comme un autre Empty

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